Ponant: premiers "retours d'expérience" pour les militaires français
PARIS, 14 avr 2008 (AFP) - Trois jours après le dénouement de la prise d'otages du Ponant qui a mobilisé près de 1.500 soldats français et d'importants moyens au large de la Somalie, les militaires tirent les premières leçons de l'opération.
Impliqué étroitement dans le dispositif, un officier retient quatre atouts majeurs dans ce type de crises, anticipant sur le " retex " (pour "retour d'expérience") cher aux militaires.
Il faut, dit-il, disposer d'unités prépositionnées à travers le monde, d'une base logistique à proximité du lieu de la crise, pouvoir piocher dans chaque armée (terre, air mer) "les compétences exactement nécessaires" et entraîner en permanence les forces.
"Si tous les moyens étaient concentrés en Méditerranée ou en mer d'Iroise (au large de la Bretagne, NDLR), il faudrait quinze jours pour arriver sur place et pendant ces quinze jours nous serions aveugles et manchots", observe-t-il.
Dans l'affaire du Ponant, pris d'assaut par des pirates somaliens le 4 avril à 7.000 km de la France, Paris disposait "deux heures plus tard d'un aviso, le commandant Bouan, au contact visuel, et capable de nous renseigner sur ce qui se passait à bord", souligne cet officier.
"Cette connaissance nous permettait de choisir entre deux modes d'action, négociation ou intervention, et d'apprécier un éventuel franchissement de la ligne rouge fixée par le président de la République, à savoir une menace imminente sur la vie des otages", explique-t-il.
Une situation à rapprocher de celle du cargo danois Danica White resté trois mois aux mains de pirates somaliens cet été avec son équipage sans que Copenhague ne sache ce qui se tramait à bord et ne puisse envisager la moindre intervention.
Dès le lendemain de la prise d'otages du Ponant, 18 commandos marine étaient parachutés en pleine mer et récupérés par le Commandant Bouan.
"C'est le deuxième enseignement de cette affaire, nous disposions avec eux d'une capacité d'intervention initiale, même limitée, mais cela n'aurait pas été possible s'ils n'avaient pas été prépositionnés à Djibouti", distant de 1.200 km, souligne encore cet officier.
Troisième enseignement: cultiver une approche "interarmée", associant hommes et moyens des trois armes (terre, air, mer), rejoints, dans le cas présent, par les gendarmes du GIGN.
Au final, l'opération du Ponant aura mobilisé quatre bâtiments de la Marine nationale dont le porte-hélicoptères Jeanne-d'Arc, son hôpital embarqué et quatre hélicoptères dont deux de l'armée de terre, une cinquantaine de commandos du Commandement des opérations spéciales (COS), dix gendarmes du GIGN, un avion de reconnaissance Atlantique 2 de la marine, un Transall de l'armée de l'air.
Quant au quatrième point, "l'entraînement permanent des forces pour entretenir leur qualification opérationnelle", selon l'expression de l'officier interrogé par l'AFP, il a trouvé toute son expression quand la Jeanne d'Arc qui poursuivait son tour du monde avec 160 élèves-officiers s'est reconfigurée pour participer à une mission de combat.
Chef de cabinet militaire du ministre de la Défense Hervé Morin, l'amiral Xavier Païtard retient quant à lui "l'efficacité" du plan Pirate-mer, immédiatement déclenché par le Premier ministre François Fillon.
"Tous les acteurs de l'Etat ont été immédiatement à leur place avec des procédures connues", souligne-t-il.
De source proche du dossier, on ne relève qu'un seul point négatif: la vétusté du matériel militaire, comme les vieilles Alouette 3 et les Gazelle, qui exigent que les mécaniciens travaillent jour et nuit pour assurer leur disponibilité.